Là où tout à commencé

Posté par: Hélène Salaün Dans: L’aventure Renoué Sur: mercredi, janvier 29 2020 Commentaire: 0 Frappé: 1763

Aujourd’hui je voulais vous dire quelques mots sur l’origine de Renoué. Je vous raconte où et comment a commencé cette belle aventure. Comme beaucoup d’histoires contées par des entrepreneurs, la mienne a débuté avec un désir de changement. Une prise de conscience qui, de fil en aiguille, m’a fait comprendre qu’il n’était plus possible de faire autrement. La meilleure leçon de vie que j’ai pu recevoir, suivre son intuition est toujours une bonne idée.

Voici en quelques lignes mon histoire et ce qui m’a conduit à Renoué, mes études et mon entrée dans la vie professionnelle.

J’ai passé mon enfance et adolescence en région parisienne. Au moment de faire un choix d’orientation en 3ème, j’ai choisi de faire un lycée Art Appliqué. C’est simple, je ne me voyais pas ailleurs. Ces 3 années m’ont ouvert les yeux sur les champs des possible lorsqu‘on est créatif et j’ai découvert avec joie les différents domaines du design, avec une grosse affinité pour la matière, les tissus, les surfaces. J’ai ensuite trouvé la formation parfaite à Roubaix, un BTS. Une belle initiation à la matière, une exploration de celle-ci sous toutes ses dimensions : tissage, tricotage, imprimé, motifs, découpage… Un régal pour les yeux et les mains.

J’ai poursuivi mon chemin dans la région de Lyon avec une licence en alternance. Fini les expérimentations, j’étais dans le concret, les pieds dans la vie professionnelle. Pendant une année, j’ai alterné formation de styliste infographiste, projet tutoré (consistant à créer une marque fictive avec d’autres étudiantes) et stage en entreprise. Je n’ai jamais autant appris que pendant celui-ci. La boite en question produisait des tissus, jacquards et imprimés pour l’habillement femme et enfant, en France et à l’international. La frénésie des collections, la rigueur dans le suivi des productions, les recherches stylistiques, le relationnel avec des fournisseurs, faire vite et bien. On m’a proposé de rester en et j’ai accepté. 2ans et demi après, je saisi une opportunité et tente une nouvelle expérience dans une entreprise spécialisée en imprimés. Toujours la frénésie des collections, une production en continue pour suivre les tendances, attraper les commandes qui n’étaient pas toujours au rendez-vous. Un rythme qui donne le tournis. J’étais en CDI et tout me poussait à rester pour monter les échelons, faire ma place, mais mon cœur me disait d’en faire autrement.

J’avais ce besoin profond d’être accord avec mon métier, de participer à quelque chose qui avait vraiment du sens. « J’adore la mode mais c’est tout ce que je déteste » dit Loïc Prigent. C’est vraiment ça. Les couturiers, la mode, les tissus, élaborer des collections, créer des motifs, j’adore tout cela. Mais à contrario j’avais développé une hantise pour toute la face cachée de la mode, la fast-fashion qui détruit toute empathie pour la planète et ses habitants. Et puis j’avais aussi besoin de me rapprocher de mon amoureux, cette relation à distance avait trop duré. On a tous connu ce moment dans la vie où les planètes s’alignent et le destin trace notre route. Il était temps que je m’en aille.

Avec ces deux postes j’ai été au cœur du textile Français qui tente tant bien que mal de garder sa place au sein de l’industrie de la mode. Le métier souffre tous les jours de faire face à une concurrence redoutable. J’ai eu l’occasion de faire de belles rencontres, des beaux exemples d’initiatives qui font non seulement perdurer un savoir faire mais qui pousse aussi le métier vers le haut pour toujours faire mieux. Le textile, c’est le sous marin de la mode. On parle des marques, de leurs histoires, de leurs fondateurs mais jamais de l’ouvrier qui a tissé ce jean, de la styliste qui a dessiné ce motif. Je vous en parlerais bientôt dans un autre article de toutes ces initiatives qui mettent en lumière les femmes et homme de l’ombre qui constituent l’industrie textile

De ces deux expériences, je garde des milliers de bonnes choses. Des compétences en stylisme, en organisation, en infographie, en couleur, des rencontres, des amitiés, beaucoup de larmes, du stress, des usines, des voyages, des salons, la fierté d’avoir fait, une, deux, trois, dix collection, d’avoir vu mon imprimé sur des centaines de mètres de tissus …

De ces deux expériences je retiens aussi des points, car la vie en entreprise, parfois c’est simple, mais parfois c’est très compliqué. L’humain et la planète n’y occupent pas toujours une place centrale.

Oui et la planète dans tout ça?

Le monde est en train de changer et les marques n’ont pas d’autre choix que de se plier aux exigences de leurs clients. Ils veulent des labels Oeko-tex, du bio, du Made-in-France, des matières naturelles et responsables à produire. Exit le polyester produit à partir de pétrole et la viscose* car celle-ci contribue à la déforestation. Le made-in-France permet également de faire perdurer le savoir faire local et de réduire les coûts de transport. Et bien même si chaque boite tente de faire de son mieux, ce qu’on laisse paraitre est souvent la partie émergée de l’iceberg.

Il y a beaucoup de belles initiatives mais on ne peut pas se leurrer. Chaque étapes de la chaîne est polluante, gaspille et produit des déchets. Et là je vais vous parler du sujet qui me touche le plus. Après avoir été cultivé, filé, tissé et apprêté, la vie d’un tissu peut s’arrêter nette. Je vous explique cela avec la petite infographie ci-dessous, qui met en avant toutes les étapes de la chaînes où de la matière est jetée, parfois pour être revalorisée derrière, mais souvent pour être jetée puis détruite.

Voilà le paradoxe auquel j’ai été confronté : la mode est belle, elle perdure un savoir faire, elle fait du bien au moral et à l’économie, elle fait vivre des milliers de personnes. Mais la mode détruit, elle est futile et souvent excessive, elle dévaste des écosystèmes et pollue la terre, elle tue, maltraite des humains et des animaux chaque jour.

Pour moi qui cousait un peu dans mon coin, notamment avec des tissus récupérés, l’évidence a vite été là sous mes yeux. En parallèle de tout cela, depuis plusieurs années j’essayais de mettre en pratique dans ma vie le zéro déchet, tant bien que mal. J’ai remis en question mon attitude de consommation, de la cuisine à la salle de bain au dressing. J’ai passé au crible tout mon appart’ pour faire mieux avec moins, acheter plus sain et responsable. Vous le voyez venir ?

Le voilà mon projet qui a du sens ! Et là je remercie toutes les personnes que j’ai croisées et les projets qui m’ont inspirés pour finalement me pousser à me lancer. Je ne suis pas la seule à avoir eu ce déclic et c’est tant mieux. On a tant de choses à faire, tant de matières à exploiter sans en produire de nouvelles. Le constat était fait, il était temps d’agir ! C’est un changement de cap dans ma vie qui me permet d’être enfin en accord avec mes valeurs, mes convictions éthiques et ma conscience écologique.

Je vous souhaite une belle journée et merci de faire partie de cette aventure !

Hélène

*Toutes les matières utilisées dans la boutique Renoué sont upcyclées. C'est-à-dire qu’elles n’ont pas étés produite spécialement de sont des chutes revalorisées. Quelque soit la fibre de l’objet que vous trouverez ici, sont impact carbone et environnemental est donc compensé par cette pratique de revalorisation.

nb: Dans cet article, je vous fait part de mon ressenti sur les dérives qui peuvent exister au sein du textile. J'éspère ne pas avoir dépeint un portait trop noir de ce métier. Je sais qu'il existe des marques qui ont de bonnes pratiques vis-à-vis des pertes de matières ou des normes éthiques, en France ou ailleurs. Je vous reparle bientôt de ces belles initiatives!